Bien avant que les puissances étrangères ne tracent des frontières sur les collines verdoyantes de l’Afrique des Grands Lacs, le Burundi existait déjà — non pas seulement comme un territoire, mais comme une âme collective. Un royaume vibrant de traditions, de collines, de tambours sacrés, où chaque citoyen se reconnaissait dans un même mot : Umurundi.
L’histoire monarchique du Burundi, nourrie de légendes et de mémoire, voit en Ntare I Rushatsi Cambarantama l’unificateur d’un peuple et d’un destin.
Ce personnage mythico-historique, issu de la famille Ntwero, est considéré comme le premier Umwami (roi) du Burundi. Il aurait instauré la monarchie en rassemblant des territoires naguère morcelés, jetant ainsi les bases d’un royaume uni.
Sous les règnes des rois, le pouvoir ne se limitait pas à une autorité personnelle, mais renvoyait à une responsabilité collective. Le roi, entouré des Abanyamabanga — dignitaires jouant un grand rôle dans l’intronisation et la continuité du trône — et des Bashingantahe, gardiens de l’équilibre moral, était le garant de la stabilité, de la justice et de la paix.
Les tambours royaux, notamment le Karyenda, ne battaient pas pour un clan — ou pour un lignage singulier — mais pour tout un peuple.
La notion d’identité dans ce Burundi précolonial n’était pas fondée sur des catégories fixes comme “Hutu” ou “Tutsi” dans le sens moderne, mais sur l’umuryango, l’appartenance à une famille/clan ou communauté proactive.
Puis vint la colonisation.
Les Belges introduisirent — consciemment ou non — des classifications, des hiérarchies, des favoritismes. L’idéologie de l’ethnicité rigidifiée est ancienne dans le temps moderne, mais trouve en cette période de domination étrangère un catalyseur puissant.
Les divisions, longtemps tacites ou symboliques, devinrent institutionnelles.
Le peuple d’Umurundi se vit contraint, morcelé, catégorisé.
Pourtant, même dans les moments les plus sombres, l’esprit d’Umurundi ne s’est pas éteint. Il survécut dans les proverbes, dans les contes que l’on racontait au coin du feu, dans le sentiment diffus qu’il y avait eu un temps où tous étaient unis.
Louis Rwagasore : l’héritier de l’esprit monarchique
C’est ici que l’œuvre du Prince Louis Rwagasore devient essentielle. Né en 1932 à Gitega, fils du Mwami Mwambutsa IV, il reçut une éducation poussée au Burundi, puis à l’étranger.
Rwagasore se distingue non seulement comme un nationaliste, mais comme un unificateur.
En 1958, il fonde l’UPRONA (Union pour le Progrès National), un parti dont le militantisme traversait les barrières ethniques. Il prônait une vision de “Burundi libéré, uni, prospère”, avec un discours civique, et des propositions économiques et sociales (coopératives agricoles, lutte contre l’analphabétisme, développement planifié).
Son assassinat, le 13 octobre 1961, peu après sa courte prise de fonction comme Premier ministre, brisa le projet politique qu’il portait — mais ne s’empara pas de l’idéal.
Rwagasore reste un héros national, un symbole de l’identité nationale, de l’unité et de l’espoir pour un Burundi affranchi des divisions.
C’est sur cette mémoire, sur cet héritage, que la Coalition pour la Renaissance de la Nation, CRN – Ingeri ya Rugamba, bâtit sa vision.
Non pour ressusciter un âge d’or mythique, mais pour réhabiliter l’esprit qui animait l’unité du royaume — l’idée que chaque Burundais, avant toute appartenance, est Umurundi.
La CRN – Ingeri ya Rugamba propose un Burundi sécurisé, uni, prospère et démocratique, où chaque citoyen, sans distinction ethno-raciste et régionale, retrouve sa dignité et sa place dans la Nation.
Son premier pilier est la Réhabilitation de l’Identité Nationale.
Face à l’idéologie d’exclusion et aux blessures de l’histoire post-indépendance — où des évènements comme ceux de 1965 et les influences divisives ont fragilisé la conscience nationale — seul un retour conscient sur la notion d’Umurundi peut aider à prévenir l’autodestruction.
C’est dans les enseignements du Prince Rwagasore que cette renaissance puise ses racines : un Burundi libre, uni, où le mot « Umurundi » serait plus fort que toute étiquette ethnique ou politique.
Son assassinat aura interrompu ses actes, mais pas son idéal.
Aujourd’hui, plus que jamais, le Burundi a besoin de retrouver ce souffle : transmettre à chaque enfant qu’il est Umurundi d’abord ; réhabiliter la fierté collective, la mémoire commune ; éduquer à la citoyenneté consciente.
Refuser la fatalité de la haine héritée, renouer avec le pacte ancestral d’un peuple uni dans sa diversité.

