À la veille de l’examen du Burundi par le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination raciale, sept organisations de la société civile burundaise tirent la sonnette d’alarme sur la persistance des inégalités et des exclusions dans le pays.
Dans un rapport rendu public le 18 octobre 2025, elles exhortent le gouvernement à renouer avec une gouvernance inclusive, fondée sur le respect de la Constitution, de l’Accord d’Arusha et des principes d’équité, de compétence et de transparence.
Les signataires — parmi lesquels figurent l’ACAT-Burundi, la CB-CPI, la COSOME, l’ESDDH, le FORSC, SOS-Torture Burundi et Tournons La Page Burundi — dressent un constat préoccupant : plusieurs groupes continuent de subir des discriminations structurelles.
Les Batwa, peuple autochtone vivant dans une grande précarité, sont encore marginalisés et privés de droits fonciers et éducatifs.
Les rapatriés, notamment ceux revenus de Tanzanie, peinent à se réinsérer.
Les femmes, quant à elles, demeurent sous-représentées dans les instances de décision et rencontrent de fortes barrières à l’accès aux ressources économiques.
Les opposants politiques, les acteurs de la société civile et les médias indépendants figurent également parmi les victimes de ces discriminations.
Le rapport cite en exemple le Conseil National pour la Liberté (CNL), principal parti d’opposition, dont les activités ont été restreintes à plusieurs reprises.
En janvier 2025, la Commission Électorale Nationale Indépendante a rejeté ses listes de candidats, invoquant des déséquilibres ethniques et de genre — une interprétation que les organisations jugent sélective et politisée.
La politisation des institutions est dénoncée avec vigueur.
Selon le rapport, les recrutements dans la fonction publique et les nominations, notamment à l’Office Burundais des Recettes et dans le secteur éducatif, reposent souvent sur l’allégeance au parti au pouvoir.
Des citoyens perçus comme proches de l’opposition se voient refuser l’accès à certains services administratifs, tels que les certificats de résidence ou les actes de naissance, parfois conditionnés à la présentation d’une carte de membre du parti présidentiel.
Les personnes atteintes d’albinisme ne sont pas épargnées.
Stigmatisées dès la naissance, elles subissent encore le poids de croyances culturelles discriminatoires et se heurtent à un rejet social persistant.
Les organisations signataires mettent aussi en garde contre la montée des discours de haine, notamment sur les réseaux sociaux, où certains influenceurs propagent des messages hostiles à caractère ethnique et politique.
Cette dérive, préviennent-elles, risque d’alimenter de nouvelles tensions dans un pays encore marqué par ses blessures passées.
Depuis la crise politique de 2015, la liberté d’expression et l’espace civique se sont considérablement rétrécis.
De nombreux médias et organisations ont été suspendus, radiés ou contraints à l’exil.
La Radio Publique Africaine et la Radio – Télévision Renaissance figurent parmi les exemples emblématiques d’institutions fermées ou vandalisées, illustrant la fragilité du pluralisme au Burundi.
En conclusion, les sept organisations demandent à la communauté internationale et au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale d’encourager le gouvernement burundais à mettre fin aux pratiques d’exclusion et de clientélisme politique.
Elles appellent à un retour effectif à l’État de droit, garant de la justice, de la transparence et de l’égalité entre tous les citoyens.
Ratifiée depuis 1977, la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale doit, rappellent-elles, cesser d’être un simple engagement formel pour devenir une réalité tangible dans la vie quotidienne des Burundais.

